9 Formation continue : Les ateliers

.Nous nous retrouvons en petit groupe de 8 médecins pour discuter de plusieurs cas. 1 Le premier cas que nous étudions est celui d’un homme de 50 ans qui est adressé par son médecin du travail, celui-ci lui a conseillé de vous voir pour faire les PSA. Voila les réactions de mes collègues : -Le premier : « Puisque le médecin du travail l’adresse pour faire les PSA je lui prescris d’office » -Un autre : « je ne vais pas m’opposer au médecin du travail, je lui prescris les PSA. » -Un troisième : « il a 50 ans, il faut faire les PSA.» -Un quatrième : « et faire le TR (toucher rectal). » -Un cinquième : « puisqu’il le demande je lui prescris les PSA.» -Moi : « vous savez que les études et notamment les dernières ne montrent pas qu’il soit légitime de pratiquer un dépistage du cancer de la prostate, donc je lui explique pourquoi il n‘est peut être pas intéressant de faire les PSA.» Certains de mes collègues reconnaissent que j’ai raison dans le fond, mais estiment que l’on ne peut pas rester passif ! 2 Le deuxième cas est celui d’un antillais qui a des PSA à 3,7 et qui revient vous voir.

Pour  mes collègues c’est une côte d’alerte et ils sont tous d’accord pour le revoir dans un an  pour voir comment auront évolués les PSA.

-Moi : « je me dis que j’ai eu une drôle d’idée de lui faire faire les PSA et je lui explique pourquoi j’ai des doutes sur l’intérêt de pratiquer ce genre de bilan. » La réaction de mes collègues est plus vive .Certains me disent que c’est dramatique de ne pas surveiller ce patient et que si plus tard il fait un cancer il pourra me le reprocher. 3 Le troisième cas est celui d’un homme de 62 ans qui présente des PSA à 4,8 avec une prostate homogène au toucher rectal. Première réaction du groupe : « je le rassure et je l’adresse à l’urologue.» La plupart des médecins sont d’accord pour l’envoyer vers l’urologue pour pratiquer des biopsies de la prostate ; -Moi : « je me dis que j’ai encore eu une drôle d’idée de demander les PSA. » -Ma voisine d’en face : « s’il meurt d’un cancer de la prostate dans un an il pourra t’en vouloir. » Un des médecins m’apporte son soutien. 4 Le quatrième cas est aussi très intéressant, il s’agit d’un homme de 75ans qui n’a aucun problème clinique lié à la prostate mais chez qui on a découvert au toucher rectal une prostate un peu dure sur un coté. Un médecin préconise de faire les PSA. D’autres sont d’accord avec lui. « Moi : « je vous rappelle qu’en l’absence de symptômes cliniques il n’est pas conseillé de pratiquer la recherche du cancer. » Les réactions continuent : -« mais alors tu fais quoi ?, tu ne soignes pas ! » -« Peut être qu’il faudrait ne pas être trop agressif mais je voudrai quand même faire les PSA ! » -Moi : « mais si tu fais les PSA, tu risques d’emmener ton bonhomme dans un engrenage !tu auras du mal à arrêter le processus. » -« Mais j’aimerais bien savoir où en sont les PSA ! »

Voilà à travers ces exercices, on retrouve les éléments déterminants pour les médecins lors de la décision de pratiquer le dépistage : -Le désir de ne pas aller contre l’envie d’un autre médecin. -La peur des représailles si un jour le patient développe un cancer de la prostate. -le souci de son image : agir en cherchant c’est installer une image d’efficacité. Ne pas dépister c’est ne rien faire ! -la curiosité du scientifique : savoir malgré tout où en est le patient, avoir un chiffre à se mettre sous la dent. -la peur du cancer : rien que le mot »cancer » justifie toutes les recherches, on ne peut pas ne rien faire même si l’abstention thérapeutique entraine moins de problèmes.