10 Et moi et moi et moi

Je n’ai pas envie du tout de me faire « dépister », mais pas du tout ! Pourquoi passerais-je du statut d’homme de 54 ans en forme à celui de malade, pourquoi accepterais-je que ma vie ,dès à présent, soit rythmée par les dosages de PSA, puis par les biopsies, puis par la chirurgie et tous les dégâts annoncés, pourquoi ? Ca me parait farfelu comme idée, ça ne tient pas la route, on me promet quoi ? Au mieux une petite chance d’être vivant quelques années de plus dans de mauvaises conditions, mais peut-être bien d’être amoindri sans raison valable ! Comprenez que dans ma vie de médecin, j’essaie de ne pas me mettre à la place du patient, c’est impossible, chacun sa vie, ses soucis, ses envies. Mais dans cette histoire de dépistage je suis concerné comme les autres hommes, la réflexion que j’ai pour moi est contradictoire avec la réflexion ambiante sur le dépistage. A la fin du stage de formation, j’ai demandé aux hommes de plus de 50 ans s’ils avaient fait eux même des PSA:2 sur 12 l’avaient fait .Quelle différence avec le nombre de médecins qui pratiquait le dépistage chez leur patient : 11 sur 12. Je reste perplexe devant ce dédoublement, cette idée de rechercher à tout prix un cancer chez les autres et de ne pas le faire pour soi-même ! Bien sûr, j’en ai discuté aves des participants, ils reconnaissaient simplement privilégier leur vie sexuelle et en même temps ne voyaient pas comment ils pourraient ne pas chercher un cancer chez leurs patients. Il y a une étape compliquée à franchir pour eux, « la reconnaissance de la sexualité de leurs patients et dépasser le dogme de la nécessité à tout prix de la recherche du cancer ».